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10 mars 2005 4 10 /03 /mars /2005 00:00


Le compte-rendu d’une conférence donnée à Brasparts le 12 février 2005.

Marc Pion, agriculteur et membre du conseil d’administration de Parades (Association de Paysans Autonomes vers une Agriculture Durable et Solidaire) a précisé les objectifs de l’agriculture durable lors de l’assemblée générale du réseau début mars 2005 à Brasparts (Finistère Nord).

Ce concept est né dans les Côtes d’Armor à l’initiative d’André Pochon.

Il existe maintenant une vingtaine d’associations qui regroupent 3000 paysans autour des valeurs
de l’agriculture durable.

Elle se distingue de l’agriculture raisonnée qui fait partie de l’agro-business car elle utilise le moins possible de pesticides et met en place un système de production durable agissant sur trois composantes :

- environnementale : minimum de pesticides, protection du paysage et des talus, utilisation limitée d’énergie pour diminuer l’impact sur l’effet de serre

- économique : diminuer les dépenses, augmenter la valeur ajoutée

- sociale : partage de moyens de production, de quotas

Promouvoir le système herbager
L’objectif de Parades est de faire la promotion du système de production herbager : 50% de surface en herbe, interdiction d’utiliser des produits risqués, du soja, privilégier les productions vivrières. Le système (régra anglais + trèfle) permet des achats minimum d’intrants. L’association fait des interventions dans les lycées agricoles, organise des visites à la ferme.

Elle organise aussi des réunions techniques, étudie les moyens d’améliorer la durabilité, comment diminuer les surfaces, la production et augmenter les revenus.
Social veut dire aussi « solidaire » . L’agriculture durable est ouverte sur le monde, solidaire de la
population paysanne, la plus importante dans le monde. La parole est à M. Dufumier, professeur à l’Institut National d’Agronomie de Grignon, qui a repris la chaire de René Dumont, sur l’étude comparative des agricultures dans le monde. Son dernier livre,  « Agricultures et paysanneries des Tiers Mondes » paru aux Editions Karthala, est le fruit d’un travail d’équipe sur l’étude des agricultures mises en concurrence sur le marché mondial. Leur objectif est de s’inspirer des expériences existantes afin d’accompagner les projets agricoles dans le contexte de la mondialisation. Il montre comment l’agriculture paysanne et l’agriculture capitaliste se partagent le monde.

Une agriculture paysanne menacée.

Elle prend deux formes :
- L’agriculture paysanne familiale où les agriculteurs vivent de leur travail, transmettant de génération en génération leur outil de travail et leur savoir-faire, fruit d’une longue tradition
et de la connaissance d’un territoire.

- L’agriculture paysanne diversifiée, elle, se caractérise par des investissements très importants de la part des paysans qui travaillent pour leur propre compte toute l’année, généralement en polycultures-élevage, utilisant les résidus et déjections pour créer de l’humus.
Elle reste encore aujourd’hui prédominante. Elle est cependant menacée.
Au sud, l’écart de productivité entre le paysan de Casamance, et l’agriculteur de Camargue (ou de Louisiane), tous deux producteurs de riz, est de 1 à 100 or leurs produits se vendent à prix égal sur le marché mondial. Là commence le drame humain ! Les petits paysans sont condamnés à exode
rural précipité. S’ils se lancent dans la course à la compétitivité,  ils s’endettent et sont voués à la misère et à l’insécurité.

L’agriculture paysanne du Nord est menacée également. La course à la compétitivité, «produisez toujours plus et faites des économies d’échelle », aboutit au divorce carbone-azote. La
spécialisation fragilise et il est urgent de trouver des formes alternatives pour ne pas dépendre des intrants importés comme le soja.

Une agriculture capitaliste qui gagne du terrain
L’agriculture capitaliste prédomine quant à elle dans certains pays. Le
capital est investi par un capitaliste et non un travailleur.
La gestion en est confiée à un gérant avec pour objectif d’obtenir une
rémunération du capital de 10% minimum. Cette
agriculture provoque le départ précipité des agriculteurs qui émigrent
vers les villes, qu’il y ait ou non du travail pour eux. Les
hommes sont remplacés par les machines, plus rentables, de manière
impitoyable. L’agriculture extensive en Amérique Latine
et en Argentine en particulier est un exemple de cette agriculture qui
chasse les hommes de la terre en la concentrant dans
les mains d’un petit nombre d’entreprises latifundium.
La main invisible
Face à cette situation, les économistes disent : « laissez faire la
main invisible ! et produisez pour l’export ». Oui, mais quoi ?
avec quels « avantages comparatifs » ?
La subvention à l’export est pour M. Dufumier « la peau de banane qui
va achever les agriculteurs du tiers-monde ». Que va
donc produire le Sénégal ? des enfants, de la main d’œuvre ?!! Le
Pérou, par exemple, produit la coca avec un réel avantage
comparatif, mais les Etats-Unis interdisent son importation ! En
suivant la thèse du libre-échange, de la libre circulation des
marchandises et de la main d’œuvre, de l’affectation optimale des
ressources, en état de concurrence parfaite, on aboutit à la
baisse de la population dans les zones peu fertiles et à la
concentration de la population dans les zones fertiles. La seule
issue pour les pays du sud est de mettre des protections aux
frontières, ce qu’a fait le Japon pour le riz, les Etats-unis ou
l’Europe..

Une seule solution : protection et qualité
Les agricultures paysannes méritent d’être protégées par des droits de
douane, des appellations contrôlées, des filières de
qualité. M. Dufumier voit une réforme possible pour relancer la demande
: donner l’accès à une nourriture de qualité
quasiment gratuite pour les écoles, les universités, les hospices.. Son
credo : Prix élevés, paysans mieux rémunérés, exode
rural évité ! Son combat : défendre la liberté de chacun et des paysans
en particulier à vivre chez soi, au pays. M. Dufumier
conclut sur une note optimiste en faisant remarquer les progrès de la
contestation face à l’OMC, à Seattle ou à Cancun et
bientôt à Hong-Kong.

P.S. M. Dufumier aura une rubrique régulière dans la lettre
d’information de Parades. Vous en trouverez des échos sur notre
site chaque trimestre.

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